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[TRIBUNE] Au milieu des aberrations administratives, la xénophobie passe pour monnaie courante

La Rédaction 5
Temps de lecture estimé : 4 minutes

Jamais nous n’aurions pensé que les choses se fassent ainsi. Pourtant, le neuf octobre 2018, après huit mois d’efforts pour s’intégrer à la société Confolentaise, six réfugiés du Centre d’Accueil et d’Orientation de Confolens ont été contraints de partir pour Poitiers afin d’être pris en charge par une autre structure. Neuf autres le seront dans quelques jours. Des mois de travail, d’adaptation à de nouvelles mœurs et d’amitié, réduits à néant. Et au milieu de cela, le racisme. Le racisme qui, toujours plus insidieux, nourrit par les a priori, sert de catalyseur à la haine. Cette tribune prône l’ouverture d’esprit, loin de tout clivage politique. Cette tribune fait l’éloge de l’Humanité qui, en des temps troublés où le rejet de l’autre semble devenir la norme, a plus que besoin d’être redéfinie comme une priorité.

Le neuf octobre était le jour des adieux. Six réfugiés, hébergés depuis huit mois au Centre d’Accueil et d’Orientation de Confolens (le fameux « CAO ») ont été déplacés vers Poitiers. Ils quittent un environnement stable, généralement bienveillant, fait d’associations ouvertes et disposées à intégrer au mieux de nouvelles personnes. C’est par exemple le cas du club de football, qui a bataillé dur pour obtenir des licences à six joueurs de toutes origines.

Certains réfugiés avaient également trouvé un emploi, ou était sur le point d’être intégrés dans des entreprises (dans le BTP par exemple, pour occuper des postes que, pour citer le patron de l’entreprise, « personne d’autre n’accepterait »). Ils partiront donc pour Poitiers, où ils seront accueillis dans un centre deux fois plus grand, avec pourtant autant d’accompagnateurs que ceux de Confolens. Il est en fait probable, et très regrettable, que des individus qui ont bataillé pour le droit de mener une vie digne soient une fois de plus condamnés à l’instabilité -jusqu’au prochain transit.

La décision a été prise par l’OFII, l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration, en seulement trois jours. Ces soixante-douze heures auront donc suffit, par un simple mail envoyé aux gérantes du CAO, à anéantir un travail d’intégration de longue haleine. Comme souvent, cette décision est le fruit d’une aberration administrative. Audacia, l’association en charge de l’accueil des réfugiés, n’a pas été consultée. Les gérantes du centre d’accueil n’ont pas été consultées. Les associations locales n’ont pas été consultées. Les futurs patrons n’ont pas été consultés. Les habitants n’ont pas été consultés. De facto, personne n’a été consulté, et la décision est unilatérale et froidement logique. C’est d’abord contre cette froide logique que nous nous révoltons. Il est à notre sens aberrant de prôner l’intégration comme valeur républicaine et de se servir de la « non-intégration » des émigrés à des fins politiques, puis de briser un tel processus en très bonne voie d’accomplissement. Le contexte aurait dû jouer, il aurait dû être pris en compte et primer sur des calculs administratifs dignes de machines. Notre république ne doit pas être une république mécanique, où chaque humain n’est qu’une variable supplémentaire, mais une république altruiste, soucieuse de la justice de ses mesures.

Nous, signataires de cette tribune, nous révoltons également contre la xénophobie engendrée par cette décision. Une xénophobie que l’on retrouve  sur les réseaux sociaux, à coup de “Bon débarras” et d’insinuations calomnieuses. Cette xénophobie, c’est un cri de haine ; un cri de haine nourri par la haine. Elle se veut légitimée par des a priori, des affirmations sans fondement, des mensonges éhontés, diffusés par certains partis politiques à des fins populistes et électorales. Cette haine, c’est la haine du repli sur soi, dont le moteur n’est que la peur de l’autre ; ce n’est finalement rien de plus que l’ignorance dirigée contre le genre humain.

Pourtant, une fois de nombreux éléments pris en considération, seule l’empathie et le respect devraient subsister. Considérez donc avec raison que les réfugiés du CAO de Confolens sont pour la plupart des réfugiés politiques, fuyant la guerre ou les percussions rencontrées dans leur pays. Considérez donc avec certitude, que les réfugiés du CAO de Confolens vivent sur une rente mensuelle de 150 à 200€. Considérez donc sans crainte de mentir, que beaucoup des vêtements qu’ils portent sont des dons faits à travers des associations comme le Secours Populaire.

Notre message n’est pas politisé. Car faire preuve d’Humanité n’est en rien politique. Nous appelons seulement chacun, qu’il soit adulte ou enfant, chômeur ou travailleur, de droite ou de gauche, libéral ou anticapitaliste, à se pencher vers l’autre. Nous appelons chacun à tenter, au quotidien, de mieux comprendre son prochain. Notre message est un appel à l’amour, qui n’a rien d’utopique tant il est simple à accomplir. Notre message est un message de soutien à tous les migrants qui chaque jour, sont victimes de la xénophobie. Notre message est un message de soutien à tous les réfugiés submergés par un tumulte administratif, sans disposer des outils pour le comprendre. Mais surtout, notre message est un message de tristesse et de colère. De colère face au non sens de la décision administrative prise par l’OFII. De tristesse face au coup donné à la diversité culturelle de Confolens.

SIGNATAIRES : Quentin SAISON, Maëlle BIRET, Théo FOURGEAUD, Félix RICHEFEUX, Chloé CHARTIER, Lucie THYBAUD, Oriane RATIER, Suzie LAURENT, Ilhona BICHON, Rachel PAMART, Auriane PLOUCHART, Géraldine GOUJON, Ilona MOUSSEAU

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  1. Léa Léa

    Bravo et merci pour cet article si nécessaire! Relevons donc les manches encore plus haut, et ne lâchons rien.
    A trés bientôt!

  2. ARMELLE ARMELLE

    Très beau texte et tellement vrai. Continuez comme cela. J’espère que vous serez lus par beaucoup et que cela aidera certains à prendre conscience de ce mal qui ronge notre société petit à petit.

  3. Gaelle Gaelle

    Bravo très belle tribune qui me rassure sur l’avenir quand je vois des jeunes qu’on stigmatise bien trop souvent comme incapables de penser avoir de si beaux propos!!! Continuez ainsi et encore merci pour votre article

  4. Olivier LACROIX Olivier LACROIX

    En lisant cette tribune construite, étayée, humaniste et pleine de fraicheur politique – la vraie, celle qui donne vie à la citée – je me prends à imaginer des lendemains enchanteurs et enchantés.
    Bravo à vous, bous êtes l’avenir et c’est rassurant.

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